Vendredi 30 mars : jusqu'à Da Nang (120kms environ)

De Hué à Da Nang, la journée promet d’être chaude car très tôt, ce matin, le soleil a percé  et dès que nous mettons le nez à la fenêtre (de l’hôtel), nous somme pris par une vague calorifugée avoisinant déjà le 30° et qui va aller en s’accentuant au fil des kilomètres, pas toujours plats avec des séquences à rire, telle la traversée en bac que ne feront pas les voitures. On verra pourquoi!

La ville de Hué n’est pas à la fenêtre lors de notre « envol » mais presque et le tandem a largement les faveurs. Puis, par les petites routes, cap au sud! On peut apprécier quelques plantations d’arachides tandis que les pastèques sont à vendre en bord de route. Les guides nous gratifient de grandes tranches à chaque arrêt. Elles désaltèrent et ce n’est pas de trop.

Le croisement où se fait la séparation est là. Babette, main douloureuse après avoir avalé un goudron très ondulé, arrête. Dommage, car elle ne sera pas de la « traversée. ». Nous évoluons entre mer et terre après avoir rejoint Thuan An. Les petits hameaux se succèdent mais à Hien Van, il faut bien passer de l’autre côté...Rien à l’horizon, nous attendons sagement, ajoutant quelques photos supplémentaires.

Non, rien à l’horizon! Pas le moindre « rafiot », pas le moindre bateau, quand apparaît sur notre gauche, venant on ne sait d’où, une barque, que dis-je : une barcasse d’un âge avancé mais à moteur tout de même, un moteur qui ronronne sans défaillance aucune. Sur celle-ci, vont s’entasser, motos, piétons, cyclos et vélos (chargée jusqu’à la gueule, dirait-on avec d’autres engins). Si la situation n’a rien d’académique, elle ne fait pas sourciller pour cela, le vietnamien placide.

S’il y est, nous pouvons y aller et effectivement, nous suivons sagement le flot, nous glissons, passons au pied des piles du futur pont qui dès l’an prochain, enverra aux oubliettes (ou au musée) ce moyen de transport d’un autre temps. Nous en sommes même à sourire...

Déchargement  et petite route sympa le long de l’onde. Sympa, oui...tant qu’elle ne se met pas à grimper car tout d’un coup, les pourcentages deviennent stressants. Certes, le paysage prend une dimension supplémentaire sans nous faire rêver. Des cols à noms évocateurs (du bonheur, de la richesse) parsèment notre route qui a contourné le golfe de Cau Hai.

Après la halte boissons-rafraîchissements, la nationale nous tend les bras. Henri qui jusque là, avait été sage dans le peloton, appareil photo en bandoulière, est piqué par on ne sait quoi. Dans son délire (!...), il accélère, prend délibérément la tête d’un petit groupe. Le compteur passe les 25, plus se stabilise à 28 tandis que la chaleur est de plus en plus suffocante.

En fait de bonheur, c’est celui d’être arrivé au repas. Quant à la richesse, on verra plus tard car il faut pour cela, passer dans les...nuages. Le ventre rempli dans un cadre idyllique en bordure de la Mer de Chine, nous décidons d’attendre une heure plus clémente pour repartir vers Da Nang.

Vers 16 heures, il fait toujours lourd, nous délaissons la gauche et le tunnel pour prendre à droite, la bosse.

Que n’avons-nous entendu sur ce col des Nuages (de son vrai nom : Hai Van), point culminant de cette journée...

Il monte, c’est vrai mais il n’a rien d’un mur. Seule, la sudation est énorme mais on s’y attendait. Dès l’approche de la plaque, un essaim de guêpes nous chasse, des guêpes qui veulent vendre tout ce qui est inutile pour un euro...Pas le temps de respirer, de s’éponger, de regarder le superbe paysage car aujourd’hui : grand beau temps, pas le moindre...nuage, les quelques rares qui parsèment le ciel sont derrière nous. Nous faisons un pas à gauche, elles aussi - un pas à droite, elles aussi et elles sont nombreuses. Tout cela finit par un regard agressif à leur égard et certainement  qu’elles nous lancent des mots peu gentils prononcés dans la langue du pays. Comme nous ne comprenons pas...

Etant monté en tenue allégée, j’ai omis de prendre le coupe-vent pour la descente...(ainsi que mon ravitaillement en barres : il ne me quitte jamais...sauf aujourd’hui). Une feuille de plastique le remplace avantageusement lorsque nous nous lançons sur les lacets. Marie est juste devant et là, c’est la félicité. Nous glissons jusqu’à la plaine et Kim Lien puis passons la rivière Cu Dé. Là, tous comme un seul homme, nous stoppons sur le pont face au superbe coucher de soleil. Pour quelques secondes de trop, nous n’avons pas un fragment de l’astre dans la boite mais au contrôle, c’est une image superbe.

Il reste encore une quinzaine de kilomètres quand je sens l’arrivée de l’hypoglycémie...Danièle en bonne samaritaine, me dépanne et le peloton divisé en deux parties prend la route de la mer en flirtant tout de même, avec le 30km/h. Un monde fou est dehors, mangeant sur les bas-côtés, à croire que les Vietnamiens du nord au sud, ne vivent que la nuit...Quelques feux rouges et enfin le bercail.

Tiens, bizarre, des avions à réaction (ils ne peuvent être que militaires) rappellent à notre souvenir l’affaire du 17ème parallèle...

Quatrième ville du pays sans passé prestigieux, c’est le point de départ pour la Montagne de marbre, une portion de la piste Ho Chi Minh. Dès 1858, la ville eut une évocation portuaire (L’amiral Rigault de Grenouilly en fit une base pour le ravitaillement en charbon de la flotte française. En 1888 sous le nom de Tourane, elle devenait concession française. C’est surtout dans les années 1950 que l’on note un plein développement tandis qu’en 1965, elle devenait la plus grande base aéro-navale américaine du sud-est asiatique. Les B52 partaient régulièrement de là pour bombarder le Nord et le Laos. En 1975, on note un afflux de réfugiés que les troupes sud-vietnamiennes abandonnent. Dix ans plus tard, les soviétiques obtiendront des facilités pour l’installation d’une base navale et aérienne. En raison de son importance économique (aéroport international, zone de production de riz, de thé et de tabac, usines de tissage, de constructions mécaniques vouées à l’export, elle est dirigée depuis 1997 par un gouvernement autonome.

Christian ASPE